NINIVE
par Jack Cochrane
À quelque 350 kilomètres au nord-ouest de Bagdad, sur la rive gauche du Tigre, s'étendent les ruines de la capitale de l'antique superpuissance, l'empire assyrien. Ninive était bien connue des prophètes de l'Ancien Testament. Au VIIIe siècle avant Jésus-Christ, Jonas y prêcha à contrecœur, ce qui a pourtant mené les Ninivites à la repentance. Au même siècle, Ésaïe prédit le jugement de Dieu sur l'Assyrie. Au siècle suivant, Nahum et Sophonie répétèrent la prophétie de ce jugement de Dieu sur Ninive et sa destruction imminente. Dieu accomplit ces prophéties en faisant venir les Umman-manda, alliés des Babyloniens, qui détruisirent la ville en l'an 612. La destruction était si totale que même le souvenir de son emplacement disparut et son existence devint légendaire.
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Pendant des siècles, de nombreux historiens considéraient Ninive comme une ville fictive, une invention de l'imagination des auteurs de la Bible. C'était au milieu du XIXe siècle que certains archéologues français et anglais, œuvrant dans une région qui fait partie de l'Irak aujourd'hui, entreprirent les fouilles dans le Tell de Kouyoundjik, un monticule formé par l'accumulation de débris séculaires qui cachait les ruines de la ville. On retrouva les vestiges des fondations de la muraille et l'emplacement des portes. On a mis au jour les ruines du palais de Sanchérib, roi d'Assyrie à l'époque d'Ésaïe (És. 36:1), ainsi que le palais et la bibliothèque impressionnante (22 000 tablettes d'argile) d'Assurbanipal, petit-fils de Sanchérib, appelé aussi Osnappar (Esdras 4:10). Les trouvailles archéologiques confirmèrent ainsi l'existence historique de la grande ville de Ninive et en même temps appuyèrent l'historicité de la Bible.
C'est un scénario qui se répète maintes fois depuis le début de la science archéologique il y a environ deux siècles. Il s'agit d'un scénario en deux temps : les critiques de la Bible la prennent pour mythe, légende ou parabole; par la suite l'archéologie, par ses découvertes continuelles, confirme son historicité. Il y eut un temps où on croyait qu'il était impossible que Moïse ait écrit le Pentateuque parce que l'écriture n'existait pas encore aux jours de Moïse. Cette hypothèse erronée fut abandonnée au milieu du XXe siècle. Les fouilles à Ebla (en Syrie) ont permis la découverte de cette ville d'une grande importance politique, commerciale et culturelle. Dans les ruines d'Ebla on trouva une impressionnante bibliothèque contenant 16 500 tablettes d'argile datées d'environ 2300 av. J.-C., plus de huit siècles avant Moïse !
Les Héthiens, appelés aussi Hittites, nous donnent un autre exemple. Depuis le jour qu'Abraham acheta le champ à Éphron le Héthien (Gen. 23:10) jusqu'aux jours d'Esdras (Esd. 9:1), il y avait des Héthiens en Canaan. À l'époque de la conquête, ils constituaient une nation ennemie importante (Josué 1:4). Au début du XXe siècle, de nombreux historiens croyaient que les Héthiens étaient une petite tribu sans importance parce que cette nation n'était jamais mentionnée nulle part ailleurs que dans la Bible. Des fouilles archéologiques à Boghaz-koï, en Turquie, et ailleurs confirmèrent l'importance de ce peuple. Les Héthiens constituaient un empire puissant rivalisant avec ceux d'Égypte et de Mésopotamie.
Il y a d'autres exemples, comme Sargon, roi d'Assyrie à l'époque d'Ésaïe (És. 36:1), et Belschatsar, dernier roi de Babylone (Dan. 5:30). Mais, revenons à Ninive.
Il y a eu d'autres attaques contre la précision historique de la Bible par rapport à Ninive. Le prophète Jonas nous informe de la grandeur de la ville :
Et Jonas se leva, et alla à Ninive, selon la parole de l'Éternel. Or Ninive était une très grande ville, de trois jours de marche. (Jonas 3:3)
Certains critiques, Voltaire y compris, disaient qu'en général la Bible exagère. Dans ce cas précis, l'auteur grossit le pourtour de la ville, étant donné qu'aucune ville de l'antiquité ne présentait de telles dimensions et que si une telle ville avait déjà existé, on en trouverait des vestiges.
Ninive, dès sa fondation par Assur, faisait partie d'une grande ville, une agglomération formée de Ninive et de ses faubourgs :
De ce pays-là sortit Assur; il bâtit Ninive, Rehoboth-Hir, Calach, et Résen entre Ninive et Calach; c'est la grande ville. (Gen. 10:11-12)
Les ruines de Calach se retrouvent à une trentaine de kilomètres au sud de Ninive, tandis que celles de Rehoboth-Hir et de Résen n'ont pas encore été identifiées. En plus des ruines d'une muraille autour de Ninive, il y a des vestiges d'une muraille s'étendant à partir de celle-ci le long du Tigre vers le sud-est jusqu'à Calach, ce qui indique que les deux villes se trouvaient à l'intérieur d'une même enceinte. Il est tout à fait possible aussi que la ville de Khorsabad, lieu du palais de Sargon (És. 20:1), située à une vingtaine de kilomètres au nord-est de Ninive, soit comprise dans cette grande métropole. Il est possible que cette grande ville avait son propre roi distinct du roi d'Assyrie étant donné que Jonas parle du "roi de Ninive" et non du roi d'Assyrie (Jon. 3:6).
À la fin du XXe siècle, le service des Antiquités irakien a entrepris un programme, très controversé, de restauration de la muraille et des portes de la ville. Il s'agit d'un programme, non pas de préserver ce patrimoine unique que sont les ruines de Ninive, mais de reconstruire la ville telle qu'elle était aux jours glorieux du roi Sanchérib, qui a laissé une description détaillée de sa construction. Étant donné que l'Irak a d'autres préoccupations depuis une douzaine d'années, les travaux à Ninive, comme ceux à Babylone du même genre, ne progressent plus.
L'archéologie étudie des vestiges ensevelis de civilisations disparues tels que monuments, documents, poterie, ustensiles et autres débris. Les fouilles au Moyen Orient ont permis des éclaircissements du texte biblique et de la confirmation de l'historicité des personnages et des endroits ainsi que la précision de nombreux détails. On sait qu'il y aura toujours des controverses au sujet de l'exactitude de la Bible parce qu'elle fait mention d'un grand nombre de personnes, d'événements et d'endroits qui ne sont mentionnés nulle part ailleurs. Il y aura toujours des "minimalistes", qui exigeront qu'une personne, un endroit ou un événement soit rapporté par une source extrabiblique pour être véridique, sinon cette personne, cet endroit ou cet événement est considéré comme fictif ou légendaire. Par contre, il y aura toujours des personnes qui attendent de futures découvertes archéologiques qui, comme par le passé, confirmeront l'exactitude historique du texte biblique.